Martin Delpuech
Doctorat sur mesure en biologie
delm39@uqo.ca mail_outlineSupervisé par : Frédérik Doyon et Philippe Nolet
Research themes
sylviculture, changements globaux, multistress, croissance, éclaircie, sécheresse, défoliation, concurrence, adaptation
Passionné par mon environnement naturel et sa compréhension, mon parcours universitaire m’emmène aujourd’hui à mener des travaux de recherche visant favoriser l’adaptation des forêts face aux changements globaux. Pan non négligeable de l’économie canadienne, la sylviculture doit aujourd’hui faire face au conséquent défis d’effectuer sa transition face à un environnement de moins en moins prévisible et de plus en plus soumis aux perturbations : sécheresses plus intenses et plus fréquentes, vagues de ravageurs forestiers, tempêtes de vent, feux de forêt… Dans un tel contexte, il est ainsi indispensable de développer un panel d’options dans l’objectif d’appuyer et d’accompagner le secteur forestier canadien. C’est ainsi que mon doctorat vient s’insérer dans un vaste projet d’envergure combinant écologie fonctionnelle des arbres et sylviculture afin de développer une sylviculture d’adaptation : « Forêts s’Adapter ».
D’ici 2050, avec l’augmentation globale des températures, la fréquence et l’intensité des sècheresses vont aller croissant. Dans le sud du Québec, les scénarios climatiques projettent des conditions plus sèches pendant l’été, avec une réduction de 20 à 40 % de l’humidité du sol sur la période 2070-2099. Afin de mieux comprendre l’impact des sècheresses, un grand nombre d’études ont tenté de simuler ce phénomène par l’exclusion de précipitation. In vitro, ces méthodes sont peu représentatives du système forestier. Ces études ont mis en avant des modifications physiologiques pouvant même impacter, au-delà de l’individu, l’ensemble du peuplement forestier. In situ, elles nécessitent de grandes parcelles, et des surcouts d’installations et d’entretiens lourds tout en engendrant des conditions artificielles à l’échelle microclimatique. Ainsi, je propose de développer une méthodologie innovante visant à simuler une sècheresse basée sur l’extraction de la sève brute de l’arbre afin de provoquer une baisse significative du potentiel hydrique du sol. En effet, chez les plantes ligneuses, la sècheresse intervient par les racines à la suite d’une baisse du potentiel hydrique du sol. Celui-ci joue un rôle important dans la dynamique du continuum hydrique de l’arbre. Ainsi, nous nous attendons, en extrayant la sève brute du xylème par un mécanisme de succion, à accélérer la demande hydrique de l’arbre au niveau des racines et à terme diminuer la quantité d’eau disponible dans le sol jusqu’à simuler un phénomène de sècheresse. En contexte de sècheresse, la littérature en physiologie végétale a longtemps considéré que la fermeture des stomates répondait à une augmentation de la concentration ([acide abscissique]) en acide abscissique (ABA). Cependant, l’idée selon laquelle l’ABA serait un contributeur important de la régulation diurne de la perte d’eau chez la majorité des espèces de plantes ne fait pas consensus. De plus, la thèse d’un modèle hydraulique plutôt qu’hormonal, chez les plantes ligneuses, a récemment émergé. Il y aurait un certain degré d’intégration entre l’ABA et le potentiel hydrique dans la fermeture stomatique. Ainsi, l’ABA interviendrait essentiellement dans le cas d’une fermeture stomatique précoce, tandis que le potentiel hydrique influencerait la fermeture stomatique pour des sècheresses plus intenses et plus prolongées. Ces patrons de réponses induiraient deux types de gestions hydriques : isohydrie, où l’arbre ferme précocement ses stomates pour se prémunir de l’embolie, au détriment de l’assimilation de carbone ; l’anisohydrie, où l’arbre prolonge l’ouverture stomatique, maintenant l’assimilation de carbone au détriment du risque d’embolie. Également, de grands arbres (fortement soumis à la loi de Darcy) auraient tendance utiliser une gestion isohydrique, influencée par l’ABA, pour se prémunir de l’embolie. A contrario, les jeunes arbres sont risques moins l’embolie, et devrait répondre à un patron anisohydrique. Cependant, la littérature indique que ce sont les plus grands arbres qui souffrent le plus du stress hydrique. Ainsi, la question de l’influence du stade de développement sur la part d’influence de l’ABA dans la fermeture stomatique reste entière.
La littérature reconnait depuis de nombreuses années que la densité d’un peuplement est un paramètre important pour la redistribution de la ressource hydrique entre les individus, de sorte que divers auteurs proposent de contrôler cette densité afin de favoriser la capacité d’adaptation du peuplement à la sècheresse. Récemment, la diversité spécifique a aussi été identifiée comme facteur permettant une meilleure capacité d’adaptation des peuplements. Néanmoins, les parts relatives de l’influence de la densité de voisinage et de la diversité de voisinage n’ont jamais été quantifiées vis-à-vis de la capacité d’adaptation de la forêt aux sècheresses.