Julien Bellerose

Maîtrise en biologie

Espèces exotiques envahissantes, plantes de sous-bois forestier, écologie des communautés, Vallée du Haut Saint-Laurent, changements globaux, traits fonctionnels
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Supervisé par : Angélique Dupuch et Isabelle Aubin

Les espèces exotiques sont des organismes provenant d’une autre région du globe qui se retrouvent dans un nouvel environnement, généralement à cause d’un transport humain accidentel ou volontaire. Plusieurs de ces espèces sont sans danger pour nos écosystèmes, mais certaines prolifèrent à un rythme incontrôlé et créent plusieurs problèmes écologiques, économiques et sociaux comme une baisse de biodiversité locale, une baisse de rendement forestier ou agricole et des problèmes de santé liés à leurs caractéristiques biologiques : ce sont donc des espèces exotiques envahissantes dans ce cas. Ces espèces sont particulièrement d’intérêt dans un contexte de changements globaux, puisqu’on s’attend à des augmentations de température moyenne annuelle et des activités sylvicoles qui vont potentiellement favoriser un plus grand nombre d’espèces exotiques à devenir envahissantes et à créer les problèmes mentionnés.

Dans un contexte forestier, la région de la Vallée du Haut Saint-Laurent sera particulièrement à risque puisqu’il s’agit du territoire majoritairement agricole avec des petites matrices forestières fragmentées favorisant les épisodes d’introduction d’espèces. De plus, la région est en première ligne pour recevoir les espèces exotiques américaines qui profiteront d’un climat plus clément pour s’établir plus au nord et la proximité du port de Montréal favorisera aussi des épisodes d’introduction futurs. Afin d’atteindre nos objectifs, nous avons utilisé une approche par traits fonctionnels, qui sont des caractéristiques végétales mesurables au niveau de l’individu (p.ex. Hauteur de la plante, masse des graines, etc.) différentes entre espèces et qui permettent de se renseigner sur le type de communauté de sous-bois devant nous sans utiliser nécessairement les noms d’espèces, mais plutôt leur niche écologique.

Dans le cadre de ce projet, nous voulions comprendre comment les communautés de sous-bois de la Vallée du Haut Saint-Laurent pourraient résister à l’envahissement par des plantes exotiques envahissantes dans ce contexte de changements globaux. Ainsi les grands objectifs de l’étude sont de déterminer : 1) si la proportion d’espèces exotiques envahissantes a augmenté dans la VHSL durant les 14 dernières années, 2) si il existe des facteurs environnementaux et d’utilisation du territoire qui favorisent la présence d’espèces envahissantes ou bien qui favorisent la résistance des espèces de la communauté locale, 3) si il existe des traits fonctionnels qui permettent de favoriser l’envahissement ou bien la résistance à l’envahissement, et 4) si certaines espèces exotiques envahissantes sont plus susceptibles de créer des problèmes en milieu forestier de la VHSL et devraient donc être plus surveillées dans les années à venir.

Pour cette expérience, un inventaire complet de la végétation dans 24 sites forestiers représentatifs du paysage régional a été effectuée en 2003 et en 2017 selon la même méthode afin d’observer les différences d’occurrence sur 14 ans. Plusieurs variables liés à la communauté locale, aux activités humaines et à la matrice forestière ont également été mesurées sur le terrain ainsi que quelques traits fonctionnels identifiés comme étant importants pour le succès d’envahissement ou de résistance à l’envahissement.

Pour le moment, les résultats préliminaires montrent que le trait fonctionnel de tolérance à l’ombre est un des plus importants pour expliquer le succès d’envahissement en milieu forestier, et que donc les espèces exotiques tolérantes à l’ombre comme Rhamnus cathartica, Epipactis helleborine et Lysimachia nummularia seront les plus susceptibles de causer des problèmes dans les communautés de sous-bois de la VHSL. Ces espèces ont d’ailleurs vu leur proportion augmenter dans les sites répertoriés depuis 14 ans, alors que les espèces intolérantes à l’ombre ont vu leur proportion diminuer, signe de la force de ce trait fonctionnel dans le succès d’envahissement en milieu forestier. De plus, il a été possible de voir que les variables environnementales associées à une ouverture de la canopée comme la surface terrière de fin de succession (bois francs), le pourcentage de canopée ouverte, l’état d’avancement de la succession forestière ainsi l’occurrence totale de végétation sont les plus importantes pour expliquer le succès d’envahissement de ces espèces exotiques : en retirant le couvert forestier, la lumière arrive soudainement au sol et favorise l’introduction des espèces exotiques et de la végétation en général, puis lorsque la succession forestière atteint le niveau de forêt mature, les espèces exotiques tolérantes à l’ombre restent dans la communauté de sous-bois et créent les problèmes mentionnés plus haut.

Les prochaines étapes seront orientées vers les facteurs et traits fonctionnels qui influencent la résistance de la communauté de sous-bois locale et seront ajoutés sous peu lors du dépôt final de la thèse de maîtrise.

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